Inda et Lô, nues, pataugeaient dans l'eau boueuse, en plein milieu de la rue.
Inda aspergeait Lô avec ses quatre mains.
Lô recevait toute cette eau sur son corps brun.
Lô, j'aime bien tes petits seins.
Lô avait peut-être douze ans quand je l'ai rencontrée. Nous nous étions donnés rendez-vous derrière l'usine d'incinération. Il y avait encore des moucherons et des oiseaux.
Lô s'est dévêtue, un jour, quelques temps après, un matin du mois d'août.
Nous avons fait l'amour.
Il y avait du soleil.
Nous sommes allés manger au bord de la rivière.
Lô s'est allongée sur moi, une orange dans la bouche.
Nous avons mangé l'orange.
Une vieille dame est passée.
Elle nous a dit que les bords de la rivière étaient bien plus agréables en remontant plus loin, au-delà des quais.
Il y avait une écluse et la petite maison de l'éclusier.
Et puis Lô porta Inda au creux de son ventre.
Je ne comprenais pas. Lô est partie.
Inda et Lô, jouaient dans l'eau.
Inda se réfugia contre le ventre de Lô en me voyant arriver.
Lô regardait très loin.
Un enfant brun tendait la main, loqueteux et ivre.
Lô lui offrit une Camel.
Au-dessus de la ZUP, de grands nuages s'effilochaient.
L'eau envahissait les rues. On ne voyait plus du tout le pont de la rocade.
La cheminée de l'usine d'incinération s'est effondrée.
Pierre Belleney
Texte extrait de : Zone sinistrée (récit), chez l'auteur, 1980, épuisé