Camille de ARCHANGELIS

Trou noir (2010)

Camille DE ARCHANGELIS

Trou noir (2010)

Editions Books on Demand

EXTRAIT

 

Je me souviens encor de la chambre d’un bouge

De ses cheveux bouclés et de son corps d’albâtre

De sa montre pendue à un sautoir d’or rouge

Et du fauteuil moelleux d’un hôtel de La Châtre.

 

Sous le regard perçant d’un laquais vicieux

Elle laisse glisser son manteau de fourrure

Et pour me faire absoudre un combat glorieux

Elle retire enfin la clef de la serrure.

 

Pendant qu’une traînée me dévoile ses charmes

Sur une route étroite en dehors du hameau

J’insulte la comtesse aux yeux rougis de larmes

Qui se donne en pâture à mon frère jumeau.

 

Dans un sinistre hôtel où une fée séjourne

J’expose les raisons de ma haine secrète

En m’approchant du lit où elle se retourne

Pour se mettre avec grâce en position levrette.

 

Oubliant sans remords un cruel désaveu

Je regagne exalté la chambre contiguë

A celle de ma soeur, pour attendre l’aveu

Que me laisse entrevoir sa réponse ambiguë.

 

Dans le sombre parking du casino d’Enghien

Je contemple une gueuse au sourire immuable

Qui se courbe devant son frère consanguin

Pour lui prêter la clef d’un but inavouable.

 

Je regarde en buvant un verre d’eau potable

L’escalier de service à la rampe en sapin

Où s’accroche sans peur la femme d’un notable

Pour exaucer le voeu d’un sournois galopin.

 

Dans le port où conduit un chemin de traverse

J’abandonne à regret ma bouteille d’absinthe

Pour comprendre le choix d’une muse perverse

Et implorer Satan pour qu’elle tombe enceinte.

 

Meurtrie par les baisers d’une putain hargneuse

Au coeur d’une forêt de bouleaux et de charmes

Devant un immigré à la moue dédaigneuse

Blême, elle se rhabille en refoulant ses larmes.

 

J’observe en sanglotant la femme audacieuse

Qui remet à sa place un couteau en vermeil

Et déchire sans honte une image pieuse

Pour briser un tabou à nul autre pareil.

 


 
Camille de Archangelis
Poèmes extraits de : « trou noir » Editions Books on Demand 2010

 

2011 - Premier prix de poésie érotique francophone du Cercle Européen de Poésie Francophone Poêsias.

Chaque quatrain est indépendant des autres.