EXTRAIT 1
En deçà de la ligne où débute mon livre
Je morcelle, aux aguets, de sanglantes éponges
Prolongeant le décor de figuiers blancs de givre
Dont l’écorce est griffée de complexes mensonges.
Dès qu’elle s’agenouille aux limites du cercle
Meurtrissant mes poignets de rubans vermillon
J’emballe dans le souffre un immense couvercle
Qui estompe l’angoisse où bute mon sillon.
L’ombrage d’un sagou par-delà le volcan
Accueille les jalons d’une exquise revanche
Qui enfle mon assaut d’un ignoble carcan
Et remplit de purin son réservoir étanche.
Dans l’intermède étroit d’un duel fratricide
Elle avale épuisée un jus nauséabond
Suggérant les écarts que son frère décide
Pour briser le record d’un singe du Gabon.
Quand le soleil décline et empourpre le ciel
J’accompagne une nymphe au pull-over en laine
Sur l’avenue que longe un lac artificiel
En relisant jaloux un texte de Verlaine.
Déployant sur le sol son doux lainage grège
Afin de reculer d’une brève minute
Un morose labeur dans la cour du collège
Aphone, elle révoque un professeur hirsute.
Contrainte à engloutir l’urine purulente
Du fade jouvenceau qui l’accable d’injures
Elle adjoint au budget d’une autre postulante
Le décompte inexact d’insolvables parjures.
Un essaim d’écoliers à la verve moqueuse
Rajoute des pétards à un feu d’artifice
Pour égayer l’ennui d’une sainte visqueuse
Dont la prompte ferveur rogne le maléfice.
Elle enfile ses bas, déjouant les manoeuvres
De gamins qui voudraient parfaire la besogne
En effleurant sa peau de sournoises couleuvres
Qui grossiront un jour dans le bois de Boulogne.
Sitôt que la froidure éloigne les vautours
Elle ouvre en rougissant une porte cochère
Pour enfreindre un traité aux nébuleux contours
Sous la badine en jonc d’une habile gauchère.
Camille de Archangelis
Poèmes extraits de : « Le funambule au pied bot »
Editions ARCAM 2006
2004 - Prix Mompezat - Société des Poètes Français
2006 - Médaille de bronze - Association Poétique de Verneuil sur Avre
2009 - Prix de l’Amitié Poétique Francophone - Cercle Européen de Poésie Francophone Poêsias
Chaque quatrain est indépendant des autres.