Camille de ARCHANGELIS

Éclats de mémoire (1998)

Camille DE ARCHANGELIS

Eclats de mémoire (1998)

La Bartavelle éditeur

EXTRAIT 3

Naufrage

 

NAUFRAGE

 

Ma mémoire rugit comme un deuil au galop

Extirpant de l’oubli des rêves indigo

L’onde de mon regard, ultime et asservie

Décuple mon silence à l’audace invertie.

 

Sur un chemin strident où se vautre l’absence

Je déflore un soupir à l’ultime démence

Qu’accompagne mon cri à la haine servile

Et quelques baroudeurs au verso de la ville.

 

De mes rires tronqués, de mes glauques aveux

J’ai extrait par mégarde un souvenir hideux

Qui se mue en ivresse, harnachée de regrets

Et qui me désaltère en raturant l’été.

 

Mon destin est pareil à des morsures ivres

Où le vide anticipe un fragment de mes livres

L’ellipse de ma vie au serment dérisoire

Stimule un hymne froid où s’enchaîne ma gloire.

 

Le soleil s’atrophie en hypnoses perverses

Je ne distingue plus les gibets et les herses

Le temps me désagrège en lueurs amovibles

Me laissant ébloui par des voeux inaudibles.

 

Ma parole s’éteint dans les rets de la brume

Je renie ma dérive à l’ivresse posthume

Au-delà de l’espoir, j’arrache du néant

Une nymphe qui rôde et annexe le temps.

 

Comme un tocsin blafard aux spasmes éphémères

Où l’océan s’enlise en carillons austères

L’amertume atrophie le rythme de l’aurore

Et je parade en vain sur l’écho de ma mort.

 

Avec pour seul espoir de corrompre la nuit

J’arrache de mon coeur une larme étourdie

Des anges moribonds acclament mon tourment

Me laissant seul avec un cercueil éclatant.

 


 
Camille de Archangelis
Poème extrait de : «Eclats de mémoire»
La Bartavelle éditeur 1998